La mort de Kafka des catacombes de Paris.

 

C'était après une retrouvaille attendue de longues années, je retrouvais mon amie et lui confiais des anecdotes sans logique aucune, mais avec la légèreté certaine.

Le sourire bloqué, pendant une minute. Une minute seulement, j'ai cru que j'aurais des tonnes de choses à raconter. Mais… De quoi parler ? Puis finalement les nuages noirs de mauvais augure me voilent la vue. Je vais me taire. Il n'y a rien à dire. Il fait trop noir.

C'est donc ca, l'obscurité absolue ? Elle envahit jusqu'au cœur, glace les os, et fait rebondir un écho insupportable de courant d'air violent. Ses voix sont impalpables. Inaccessibles. Impossibilité de lutte. La solitude éternelle. Descendre toujours plus bas. Je suis allée trop loin. C'est une dimension parallèle, la réalité est loin, loin... comme si elle n'avait jamais existée que dans un rêve. Même une amitié franche ne peut ramener quelqu'un qui est descendu trop bas ? Comment me suis-je retrouvée dans ce lieu ?

C'était donc un piège, une attraction chimérique. Je me suis retrouvée emportée sans résistance. Galvanisée. Je l'ai vu se faufiler dans ce trou. Je l'ai suivi. Excitée. Exaltée. Sans me retourner à aucun moment. Ce n'est pas ce qu'on attendait de nous ? Oui mais… la sensation de liberté semblait sans limite. Le bonheur, ca existe ? Une illusion, un reflet. Malades sont ceux qui y croient. J'ai cru que plus rien n'existait. On n'était plus seuls. L'isolement avait cessé. J'ai cru qu'on serait ensemble et invincible. Mais quoi que nous tentions, nous continuons à descendre dans ce trou sans fond. Prisonniers. Et perdus. Impossible de retrouver une issue. Et à court de lumière nous ne nous voyons même plus. Nous n'entendons même plus nos angoisses. Est-ce qu'on est parti dans la même direction ? Une paroi rocheuse doit nous séparer maintenant. Nous sommes côte à côte mais seul. Sans communication. Je me parle dans ma tête sans cesse pour me rassurer. Essayer de comprendre, d'imaginer ce qu'il fait, ce qui m'entoure. Mais je ne comprends rien de ce que je dis, comme si c'était Franz Kafka lui-même qui m'écrivait une nouvelle en tchèque sur l'échine. Je ne parle pas ma langue… Ce flux d'incompréhension ne fait qu'accélérer. Un tourbillon. Est-ce pour meubler la folie ? Si elle pouvait l'emporter ce serait une libération. La folie prend son temps. La mort se fait désirer. Est-ce par déshydratation ou le froid qui l'emportera ? A moins que ce bruit raisonnant ne soit une trémie qui commence à s'effondrer sur elle-même au dessus de moi ? Répugnante ! La vie qui se traine, confuse, visqueuse qui refuse de se laisser aller.

Ce personnage Kafka des catacombes est en train de mourir. Bon débarrât. Pourvu que ca aille vite. Ce personnage est-il moi ? Non. Plus maintenant. C'est terminé. Kafka, je te répudie. Je ne suis plus un cafard. Sorts de ma tête ! Va te faire cuire un œuf, man ! Tu t'es trop foutu de moi.

- Par contre ne vous fâchez pas, mais je n'ai pas finie de visiter la galerie terminale. Laissez-moi. Après on remonte. 2 minutes encore. Promis. Faite chauffer la tartiflette. A toute.

- T'es pas raisonnable là...

- Non, non, ça, ca ne venait pas de Kafka.